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6 juin 2009

« De leur passage, les hommes pauvres laissent si peu de signes ! »

C'est le temps des cerises et des premiers abricots, des baignades frileuses et des tournois de sixte. Le MHSC remonte en Ligue 1, l'équipe de France de foot est terriblement ennuyeuse et à Roland Garros la terre est toujours orange comme une orange. Dans le chœur des laudateurs de Barack Obama, une seule voix discordante, celle de ma grand-mère : plaçant la galanterie plus haut que le protocole, elle estime qu'il aurait dû se lever de son siège pour saluer Laurence Haïm. Bruce Toussaint parle du cimetière de Colleville et des tombes des centaines de milliers de soldats américains tombés pendant le débarquement. Dehors un minuscule campagnol des champs croise mon chemin en tremblant et je pense au lapin de Cingria vibrant comme une boule de mercure. Plus tard, un vers luit, le silence se fait et tout semble à l'écoute du chant surnaturel d'un rossignol. Je croyais que la glycine n'existait que pour embaumer les soirs d'avril et permettre quelques contrepèteries, j'apprends à temps, avant de la tailler, qu'elle abrite parfois des nids de merles. La tourterelle de l'amandier n'a pas tant de chance, je ne découvre son nid qu'à la fin de ma tentative de sauvetage de l'arbre, persécuté par un lierre ligneux et cramponné, vaincu à la scie. Alors que je lis L'Oiseau de Michelet, mon attention parfois s'égare et je songe à la pauvre tourterelle, visible de tous au milieu de quelques feuilles rares et desséchées ; ses yeux m'accusent, et ne parviennent à m'apaiser que les perspectives de ripaille d'amandes fraîches en 2010. Dans le journal intime de Dabit, admirable de modestie, je lis cette phrase : « Je veux bien (je ne puis être autre chose désormais) être un intellectuel — et je souris — mais n'avoir en rien une existence plus confortable que celle d'un ouvrier. » Et je souris.

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