Concordance
Mes deux grands-mères sont croyantes. Etaient croyantes. Depuis quelques jours que l'une n'est plus, je ne sais comment conjuguer. Elles furent deux, je le maintiens, l'une catholique, l'autre protestante. La camisarde avait bénévolement tenu une librairie œcuménique, elle aimait les cartes postales et les calendriers ornés de versets bibliques. Dans la chambre où la maladie l'a des années cantonnée, j'avais retrouvé entre deux tiroirs une éphéméride de ce genre, de l'année 2006. A la date du 14 janvier, je lis : « Jésus déclara : Moi, je suis la résurrection et la vie : celui qui croit en moi, même s'il meurt, vivra ; et quiconque vit et croit en moi, ne mourra pas, à jamais. »
Mon autre grand-mère s'apprêtait à jeter un joli agenda de l'année 1965, gardé intact dans un tiroir pour quelques mystérieuses raisons. Deux ans plus tard je peux enfin l'utiliser, puisque les jours correspondent. Je le fais moi-même pour quelques mystérieuses raisons, en espérant qu'on mettra à mon crédit les plus nobles, et qu'on me pardonnera les plus mesquines.
Le 14 janvier 1965 disparaissait Jeanette MacDonald, dont je n'ai vu le moindre film, pas même Le Chant du printemps. Tout à l'heure un bruant jaune chantait la réapparition du soleil et s'enivrait de lumière. Je le trouvais magnifiquement sensé, et regrettait de l'être trop pour l'imiter. Et mécréant je songeais : mieux l'espérance que la pétrifiante peur.